16 mars 2023Les équipes de soins spécialisés : missions, financement et gouvernance

Les équipes de soins spécialisés : missions, financement et gouvernanceLes équipes de soins spécialisés : missions, financement et gouvernance

Quel est le financement des équipes de soins spécialisés ? Quelles sont leurs missions ? Quelle est leur gouvernance ? Rien d’officiel à ce jour, mais voilà à quoi pourrait bien ressembler le cadre réglementaire des équipes de soins spécialisés.

Pour rappel, les équipes de soins spécialisés sont une nouvelle forme d’organisation de la médecine libérale qui est née en juillet 2019. Pourtant, même si plusieurs projets médicaux d’ESS se sont concrétisés ces dernières années, il demeure à ce jour un certain flou sur les contours réglementaires de cette forme d’organisation.

La prochaine entrée en vigueur d’une nouvelle convention médicale cette année pourrait changer la donne. En effet, depuis le 9 novembre 2022, l’Assurance maladie a entamé une phase de négociations conventionnelles avec les représentants des médecins libéraux. L’objectif ? Construire ensemble une nouvelle version de cette convention, qui satisfasse à la fois les problématiques de santé publique dont est garante l’Assurance maladie et les enjeux de la médecine libérale.

La première phase de négociations a échoué fin février 2023, les syndicats des médecins libéraux ayant refusé de ratifier la nouvelle convention médicale proposée par l’Assurance maladie. Pour la première fois depuis 2010, il va donc falloir passer par un “règlement arbitral” : c’est Mme Annick Morel, l’ancienne inspectrice générale des affaires sociales, proposée par l’Assurance maladie et acceptée par les syndicats représentatifs, qui va rédiger une “convention minimale”.

Il reste donc un aléa important sur le contenu de ce règlement arbitral : s’agira-t-il du renouvellement de la convention médicale en cours, avec quelques ajustements à la marge, ou bien du projet de convention refusé par les syndicats ?

Nous ne pouvons à ce stade pas le dire. Toutefois, une chose est certaine, tant le sujet semble déterminant à la fois pour l’Assurance maladie et les syndicats de médecins : le sujet des équipes de soins spécialisés sera abordé et clarifié prochainement, que ce soit dès ce règlement arbitral ou dans le cadre de la prochaine convention qui doit être signée au plus tard dans les 2 ans qui suivent l’entrée en vigueur de l’avenant arbitral.

Nous vous proposons donc dans cet article de vous partager ce qui se dessine pour les équipes de soins spécialisés, à la fois sur leurs missions socles, leur financement et leur gouvernance.

Les missions socles des équipes de soins spécialisés

Les équipes de soins spécialisés auraient deux missions socles :

  • Coordonner et sécuriser les prises en charge dans une logique “parcours” ;
  • Améliorer l’égal accès aux soins de spécialité en termes géographique et financier.

Les équipes de soins spécialisés devraient ainsi mener des activités permettant d’accomplir chacune de ces deux missions.

Concernant la première mission de coordination et sécurisation des prises en charge dans une logique “parcours”, les équipes de soins spécialisés auraient pour tâches de :

  • Structurer l’offre de 2d recours sur le territoire pour faciliter la collaboration entre acteurs du 1er, 2d et 3e recours, et offrir un point de contact aux médecins traitants ;
  • Faciliter la gradation des soins via la mise en place de parcours sur certaines pathologies ;
  • Proposer une organisation permettant de donner un avis spécialisé ponctuel sur demande des médecins traitants du territoire pour leurs patients dans des délais réduits sous la forme de téléexpertise, téléconsultation ou de consultation en présentiel ;
  • Accompagner le virage ambulatoire des établissements hospitaliers notamment par la participation à l’organisation des sorties d’hospitalisation ;
  • Faciliter la pratique de la téléexpertise et de la télésurveillance sur le territoire.

En ce qui concerne la deuxième mission en lien avec l’accès aux soins pour tous de la médecine de second recours, les activités des équipes de soins spécialisés pourraient être les suivantes :

  • Contribuer au déploiement des consultations avancées pour les soins de leur spécialité notamment dans les ZIP;
  • Le cas échéant, contribuer à l’organisation des soins non programmés de leur spécialité , en lien avec les CPTS de leur territoire;
  • Se coordonner avec les acteurs de la permanence de soins.

Afin d’être éligibles aux financements prévus par l’Assurance maladie, les équipes de soins spécialisés devraient obligatoirement remplir l’ensemble de ces missions.

Les conditions à remplir pour créer une équipe de soins spécialisés

La prochaine convention ou bien le règlement arbitral pourraient préciser les critères à respecter pour pouvoir créer une équipe de soins spécialisés.

Les critères seraient les suivants :

  • Périmètre géographique : l’équipe de soins spécialisés devrait a priori couvrir un périmètre continu géographique. Ce périmètre devrait être a minima départemental (avec une cible possible régionale pour les équipes de soins spécialisés arrivées à maturité), non déjà couvert par une équipe de soins spécialisés de la même spécialité, sur lequel sont présents au moins 10 médecins de la spécialité concernée ;
  • Seuil minimal d’adhérents à l’équipe de soins spécialisés : l’équipe de soins spécialisés devrait a priori réunir au moins 20 % des professionnels de la spécialité concernée du territoire qu’elle couvre, à terme l’équipe de soins spécialisés doit avoir une cible d’intégration d’au moins 50 % des spécialistes de la spécialité concernée présents sur son territoire ;
  • Articulation avec CPTS / DAC (Dispositifs d’Appui à la Coordination) : l’équipe de soins spécialisés devrait a priori collaborer avec les CPTS présentes sur le territoire qu’elle couvre et collaborer avec les DAC de son territoire ;
  • Périmètre médical : l’équipe de soins spécialisés devrait a priori traiter des problématiques liées à une spécialité médicale et non à une seule pathologie ;
  • Intégration des professionnels hospitaliers : l’équipe de soins spécialisés devrait a priori collaborer avec les professionnels hospitaliers et formaliser ses liens avec l’hôpital en particulier pour l’organisation de la prise en charge des soins non programmés.

On voit ici que, pour qu’une équipe de soins spécialisés puisse être créée, il faudra que ce soit un projet d’une certaine ampleur et qu’il réunisse un nombre conséquent de médecins spécialistes. La question se pose pour les territoires où la pénurie médicale sur certaines spécialités est telle qu’il y a moins de 10 spécialistes. Ce cas serait a priori pris en compte : les spécialistes de deux spécialités différentes pourraient se regrouper au sein d’une équipe de soins spécialisés commune, sous réserve de l’avis favorable de la ou des CPL (Commission Paritaire locale) du territoire couvert par les équipes de soins spécialisés.

Le financement des équipes de soins spécialisés

A priori, le financement d’une équipe de soins spécialisés pourrait s’effectuer selon deux dotations :

  • Un crédit d’amorçage de 40 000 euros, à réception de la lettre d’intention simplifiée, afin de pouvoir rédiger le projet de santé, puis 40 000 à réception du projet de santé ;
  • Une dotation annuelle dès la première année de 60 000 euros.

Les modalités d’accompagnement financier des équipes de soins spécialisés pourraient être ajustées en fonction de la montée en charge de l’organisation, cela afin de prendre en compte la diversité de leurs tailles.

La gouvernance des équipes de soins spécialisés

La gouvernance de l’équipe de soins spécialisés serait a priori assurée par l’équipe de soins elle-même. Elle devra alors à ce titre prévoir en amont des modalités de consultation voire d’association des professionnels hospitaliers et des CPTS.

Conclusion

Beaucoup d’incertitudes demeurent. Face à la démographie médicale en berne et aux difficultés croissantes d’accès au second recours, il semblerait tout de même que les équipes de soins spécialisés fassent consensus entre les représentants des médecins libéraux et l’Assurance maladie. Et l’absence de réglementation sur le financement ou la gouvernance de cette nouvelle organisation semble être un frein non négligeable à l’essor de nouveaux projets. Il semble donc important que la réglementation évolue rapidement sans pour autant imposer un cadre trop rigide, afin que les équipes de soins spécialisés, qui sont une réponse concrète aux problématiques encourues par le système de soins en France, puissent prendre leur envol tout en ayant la souplesse de dessiner des projets adaptés aux enjeux de leur territoire. Reste à voir quand ces nouvelles mesures pourront être mises en œuvre dans un contexte tendu entre l’instance gouvernementale et les syndicats.

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