Introduites par la loi du 24 juillet 2019 il y a déjà cinq ans, les Équipes de Soins Spécialisés (ESS) faisaient depuis l’objet d’un flou réglementaire. Si certains projets ont pu voir le jour avec succès, ce manque de clarté juridique a empêché le déploiement massif de ce type d’organisations en France.
Tout cela est cependant sur le point de changer. Le 04 juin 2024, un nouveau projet de convention médicale a été signé par l’Assurance Maladie et les syndicats représentatifs des médecins libéraux.
Le texte a introduit de nombreux changements pour la téléexpertise et fixe un cadre législatif clair pour les ESS reprenant, avec quelques modifications, les grandes lignes de ce que nous envisagions dans cet article publié l’année dernière.
Voici un résumé de l’ensemble des dispositions, désormais officielles, prévues dans le texte.
Définition et missions
Les ESS sont une nouvelle forme d’organisation de la médecine libérale visant à améliorer l’accès aux soins de second recours dans le cadre du parcours de soins coordonné.
Dans les faits, il s’agit d’un ensemble de professionnels de santé d’une même spécialité qui s’organisent pour répondre au besoin de soins spécialisés au sein d’un territoire.
Leur mission est définie avec précision dans l’article 53 de la nouvelle convention, qui distingue désormais une mission socle et une mission optionnelle.
Leur rôle principal est de coordonner et sécuriser les prises en charge dans une logique “parcours”. Concrètement, les ESS doivent proposer une réponse adaptée au besoin du premier recours, médecin traitant en tête, en structurant l’offre de second recours sur le territoire géographique donné. Charge à elles de proposer une organisation permettant de rendre des avis spécialisés répondant aux demandes des médecins requérants dans des délais raisonnables, sous la forme de téléexpertise et/ou de consultation présentielle.
Le texte introduit donc également pour les ESS la mission optionnelle d’améliorer l’égal accès aux soins de spécialité en termes géographiques et financiers, une disposition pensée notamment pour les Zones d’Intervention Prioritaires (zones d’un territoire dont l'offre de soins est insuffisante ou difficile d’accès).
Chaque année, l’ESS devra remettre un rapport d’activité à la CPAM et à l’ARS référentes sur son territoire pour faire état du respect de ces missions ainsi que de l’état de ses effectifs.
Conditions de création et démarches
La création d’une ESS ne peut se faire qu’en respectant certaines conditions listées à l’article 55 du texte. L’Assurance Maladie formule quatre exigences :
- Une ESS doit couvrir un périmètre géographique clairement défini, idéalement régional, qui n’est pas déjà couvert par une autre ESS de la même spécialité. Par ailleurs, doivent être présents sur ce territoire au moins 10 médecins de la spécialité concernée ;
- Une ESS doit rassembler au moins 10% des professionnels libéraux de la spécialité concernée sur le territoire qu'elle couvre, avec un objectif d’intégration à terme de 50% ;
- L’ESS, en collaborant avec les CPTS et les DAC de son territoire, doit traiter des problématiques d’une spécialité au sens large sans se limiter à une pathologie ;
- L’ESS devra collaborer avec les professionnels hospitaliers et formaliser ses liens avec les établissements de santé.
Si le projet respecte ces critères, une déclaration doit être réalisée par le porteur de projet sur le site demarches-simplifies.fr, la validation du projet intervenant sous deux mois.
Financement et gouvernance
Preuve de l’importance accordée au sujet par la CPAM, le point du financement est celui qui a le plus évolué dans la version définitive du projet de convention.
S’il était d’abord envisagé un crédit d'amorçage de 40 000€, celui-ci est finalement porté à 80 000€.
Par ailleurs, chaque ESS fera l’objet d’une dotation annuelle de 50 000€ à 100 000€ en fonction de sa taille, proratisée au nombre de médecins.
La gouvernance des Équipes de Soins Spécialisés est assurée par l’équipe de soins elle-même, c'est-à-dire par des médecins libéraux spécialistes. Seules des personnes physiques peuvent donc mener ces missions de gouvernance.
La convention prévoit également que des modalités de consultation, voire de participation, pourront être octroyées à des CPTS ou des professionnels hospitaliers.
Conclusion
Les ESS devraient pouvoir définitivement prendre leur envol maintenant qu’elles sont officiellement entrées dans le droit commun. Cette clarification juridique permettra certainement l’essor de nouveaux projets où la téléexpertise jouera un rôle clé.
Vous opérez au sein d’une ESS ou avez pour projet de constituer une ESS et souhaitez mettre la téléexpertise au cœur de votre projet ? Contactez-nous via contact@omnidoc.fr.