Le Dr Cécile Guihéneuf est pédiatre et l'une des fondatrices de l'équipe de soins spécialisés Pédialib en région Pays de la Loire.
L'ESS Pédialib est une association de pédiatres libéraux ayant pour projet d’améliorer le parcours de soins des enfants et adolescents sur le territoire en s'appuyant notamment sur la téléexpertise.
Dans cette interview, elle revient pour nous sur les origines de l'ESS, son ambition, la façon dont elle est organisée et quel rôle jouent Omnidoc et la téléexpertise dans le parcours de soins.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. Je suis pédiatre à Saint-Sébastien, près de Nantes, et présidente de l’équipe de soins spécialisée en pédiatrie du 44 et du 85, que nous avons appelée Pédialib.
Pouvez-vous nous présenter l'ESS Pédialib ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. Pédialib est une association créée il y a presque deux ans, qui regroupe aujourd’hui une trentaine de pédiatres de la région de Nantes. L’initiative est née avec la nouvelle loi de santé, afin d’améliorer la coordination entre spécialistes, de mieux mailler le territoire et de valoriser ce que nous faisions déjà mais qui n’était pas visible des autorités ni des médecins généralistes.
Qui est impliqué dans le projet ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. Nous sommes actuellement une trentaine de pédiatres, généralistes et surspécialistes, réunis au sein de l’ESS.
Nous regroupons des pédiatres généralistes et des surspécialistes : cardiopédiatres, endocrinopédiatres, pneumopédiatres, allergopédiatres, neuropédiatres, néphropédiatres, gastropédiatre, etc.
Qui sont les requérants ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. La plupart des requérants sont des médecins généralistes. Nous utilisons aussi la téléexpertise entre nous, pour poser des questions de surspécialité à nos collègues.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce n’est pas sur la surspécialité que nous sommes le plus souvent sollicités. Depuis le début, la majorité des demandes concernent la pédiatrie générale. Les médecins généralistes sont assez démunis devant ces questions et ne savent pas à qui les poser car le CHU de Nantes a certes développé la téléexpertise mais principalement pour les surspécialités. Ils n’ont pas la possibilité de répondre sur des questions simples. Cela répond donc vraiment à une demande de nos collègues généralistes.
Quelles sont les demandes les plus fréquentes ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. Cela dépend du type de question. Par exemple, un médecin peut demander, avec une photo d’un cordon ombilical, s’il doit s’inquiéter ou pas. Il n’ose pas forcément poser cette question à un pédiatre hospitalier, de peur que cela paraisse trop simple. Avec nous, il la pose, nous répondons facilement et sans jugement. Nous avons simplement des pratiques différentes et sommes ravis de rendre service.
Pour des sujets comme les courbes de croissance, même quand il s’agit de pédiatrie générale, cela nécessite souvent un examen pédiatrique. Mais là encore, nous pouvons préciser le délai, dire si l’enfant doit être vu rapidement ou après un examen complémentaire.
Quel rôle pour la téléexpertise dans le cadre de l'ESS ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. L’un des axes, c’est l’accessibilité à la spécialité de pédiatrie. Nous imaginons que cela puisse faire partie du parcours de soins : dans une région où il existe une ESS avec un réseau de téléexpertise bien organisé, cela devient naturellement une étape du parcours pour les médecins généralistes.
Quel est le parcours de soin typique ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. Pour les questions de pédiatrie générale, le plus souvent il s’agit simplement d’une réponse et il n’y a pas de consultation derrière. Quand c’est une question adressée à un spécialiste, cela ouvre plus souvent sur une consultation, parfois après la réalisation d’examens complémentaires.
Comment êtes-vous organisés pour répondre aux demandes ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. Nous avions interrogé nos collègues pour savoir comment ils souhaitaient travailler. La majorité préférait que ce soit en leur nom propre. Nous avons donc fait des sous-rubriques, pour que ce soit plus facile pour les médecins généralistes.
Par exemple, en pneumopédiatrie, certaines font plus d’infectiologie, d’autres plus d’allergologie. Pour elles, c’était important d’avoir ce détail afin de mieux orienter les patients.
Comment avez-vous fait connaître le réseau de l'ESS ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. Les médecins généralistes ont utilisé assez facilement Omnidoc, qui est l’une des plateformes de téléexpertise les plus utilisées dans la région. Nous étions déjà un certain nombre de pédiatres sur Omnidoc avant la création de la téléexpertise via Pédialib. C’est donc assez naturellement que ce média a été utilisé.
Quel bilan tirez-vous de cette organisation en réseau ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. Depuis décembre 2024, nous faisons environ 150 à 200 avis par mois. La plupart des pédiatres sont très satisfaits de la plateforme et de l’organisation. Cela permet aussi de renforcer le lien avec les médecins généralistes de proximité et de différer certaines consultations qui n’étaient pas forcément nécessaires.
Quel conseil donneriez-vous à vos consœurs et confrères ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. Je crois qu’il faut d’abord se poser la question entre collègues : qu’est-ce qui correspond le mieux à la pratique de chacun ? Moi, j’imaginais plutôt un agenda tournant, mais ce n’était pas la demande de mes collègues. Il faut vraiment partir des envies et des besoins de la spécialité pour s’organiser au mieux et que le plus de collègues puissent participer.
Le mot de la fin ?
Dr Cécile GUIHÉNEUF. La téléexpertise permet de faire du lien avec les médecins généralistes et d’apporter des réponses simples qui améliorent la prise en charge. C’est un outil qui a toute sa place dans notre organisation.