Gwenaëlle CARRE est cadre de santé au CH de Saint-Brieuc. Elle a activement participé à la création d’un protocole de coopération en stomatothérapie dont la téléexpertise fait partie intégrante.
Dans cette interview, elle partage son retour d’expérience sur la naissance de leur réseau de téléexpertise, les enseignements qu’ils en ont tirés et l’impact sur le quotidien des professionnels de santé.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots et expliquer votre rôle au sein du GHT Armor ?
Gwenaëlle CARRE. Je suis cadre en chirurgie digestive à l’hôpital de Saint-Brieuc depuis quatre ans. Dans cette fonction, j’encadre également les trois infirmières stomathérapeutes qui bénéficient d’un protocole de coopération et utilisent la solution Omnidoc pour leur activité de téléexpertise.
Qu’est-ce que la stomathérapie ?
Gwenaëlle CARRE. Les stomothérapeutes sont des infirmières qui, après leur diplôme, se spécialisent grâce à un certificat les formant à l’appareillage des stomies digestives ou urinaires. Elles deviennent expertes dans la prise en charge et l’éducation des patients porteurs de stomie, de la gestion des protocoles à l’accompagnement éducatif.
Pourquoi avoir mis en place une ligne de téléexpertise dédiée à la stomathérapie via Omnidoc ?
Gwenaëlle CARRE. Nous avions déjà formalisé un protocole de coopération, validé par les sept chirurgiens du service et le chef de service, pour reconnaître officiellement des actes infirmiers jusque-là effectués de façon informelle. Mais j’ai constaté que nos libéraux et les EHPAD envoyaient des demandes « sauvages » par mails et SMS, sans sécurité ni traçabilité.
Nous avons donc créé la ligne Omnidoc “Stomathérapie” : les infirmiers libéraux et les établissements médico-sociaux peuvent poser des questions, envoyer des photos, et obtenir des conseils ou une actualisation du protocole directement sur la plateforme, sans recourir systématiquement à une consultation en présentiel.
Pouvez-vous nous en dire plus sur ce protocole ?
Gwenaëlle CARRE. Il n’existait pas de protocole de coopération stomathérapie national avant le nôtre. Nous l’avons d’abord mis en place localement à Saint-Brieuc puis, un an après, l’ARS Bretagne nous a sollicités pour un passage en national pour lequel nous sommes à ce jour en attente de confirmation. Les stomathérapeutes de toute la France pourront désormais en reprendre le contenu et l’adapter à leurs besoins. C’était une très forte attente des collègues qui assistent chaque année à leur congrès ; elles pourront bénéficier de notre travail sans repartir de zéro.
La téléexpertise via Omnidoc fait partie intégrante de ce protocole : c’est l’un des actes dérogatoires que les stomathérapeutes peuvent réaliser. Nous l’avons inclus dès l’écriture du protocole pour sécuriser ces échanges et répondre à la demande croissante de la ville.
Qui sont les principaux utilisateurs de cette ligne de téléexpertise stomathérapie ?
Gwenaëlle CARRE. Essentiellement les infirmiers libéraux, les médecins libéraux, les EHPAD et les services médico-sociaux en général.
Quels sont les motifs de consultation les plus fréquents sur cette ligne ?
Gwenaëlle CARRE. Principalement des problèmes d’appareillage : fuite de matériel, brûlures cutanées, peau irritée. Les EHPAD, surtout ceux éloignés, l’utilisent beaucoup pour éviter des transports parfois pénibles pour les résidents. Dans de nombreux cas, la demande initiale de téléexpertise suffit. Mais si la situation ne peut être gérée à distance, elles proposent alors une consultation en présentiel, ou un suivi ultérieur via Omnidoc pour vérifier l’évolution.
Comment organisez-vous en interne la prise en charge des demandes sur Omnidoc ?
Gwenaëlle CARRE. Les trois stomathérapeutes gèrent elles-mêmes leurs plages de disponibilité : chacune choisit des créneaux de réponse dans sa journée. Si la demande concerne un patient qu’elle suit déjà, cette stomathérapeute s’en occupe systématiquement ; autrement, l’une d’elles prend la demande suivante dans l’ordre de passage.
Qu’est-ce que l’utilisation d’Omnidoc a apporté au quotidien, pour les soignants et pour les patients ?
Gwenaëlle CARRE. Pour les patients, c’est un confort immense : ils évitent des réhospitalisations ou des consultations inutiles pour un simple réglage d’appareillage. Pour nous, c’est la fin des mails et SMS dispersés, avec des questions reçues le week-end ou en plein soin : tout est centralisé et sécurisé. C’est aussi une économie de temps et de transport, et une meilleure traçabilité de chaque échange clinique. Dans certains
Comment la téléexpertise a-t-elle transformé le lien entre la ville et l’hôpital ?
Gwenaëlle CARRE. La téléexpertise a rassuré tous les acteurs : les infirmières libérales, les EHPAD et les équipes hospitalières. Elle a considérablement réduit le temps de coordination : plus besoin de rappeler et fixer un rendez-vous ; la demande arrive, on y répond quand on est disponible, et on peut demander des compléments d’information. Cela libère des heures précieuses dans une journée déjà bien chargée.
Quels conseils donneriez-vous à vos collègues qui hésitent à adopter un tel protocole et la téléexpertise ?
Gwenaëlle CARRE. Ce protocole, avec la téléexpertise, il ne faut pas en avoir peur ! C’est au contraire extrêmement valorisant car cela reconnaît pleinement la compétence des infirmières spécialisées. Les chirurgiens apprécient également le gain de temps, car ils sont moins sollicités pour des demandes ou pour faire des ordonnances.
Le protocole est déjà rédigé : il suffit de reprendre les actes dérogatoires, de l’adapter et de l’intégrer à votre organisation. De la pandémie de COVID, certaines bonnes choses ont été mises en place : ce projet en fait partie.
Le mot de la fin ?
Gwenaëlle CARRE. Je suis très fière de toute l’équipe qui a fait un travail incroyable. Aujourd’hui, nos stomathérapeutes partagent même le protocole et leurs bonnes pratiques sur Omnidoc dans les écoles de stomathérapie. Si vous hésitez encore : foncez !