07 juin 2024La téléexpertise en chirurgie orthopédique : témoignage du Dr Ruyer, chirurgien libéral

Photographie du Dr Justin RuyerPhotographie du Dr Justin Ruyer

Le Dr Ruyer a mis en place un réseau de téléexpertise au sein du Centre de la Main Sauvegarde à Lyon. Pour nous, il revient sur la genèse de ce projet et dresse le bilan de cette expérience.

Est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

Dr RUYER. Je suis chirurgien de la main sur Lyon au sein de la Clinique de la Sauvegarde depuis trois ans. Au même titre que mes trois collègues du Centre de la main Sauvegarde, tous formés à Lyon, je fais de la chirurgie du membre supérieur, épaule exceptée.

Au sein de la clinique, chaque chirurgien est hyperspécialisé dans sa compétence et dans son articulation. Il y a les chirurgiens du genou qui ne font que le genou, les chirurgiens du pied qui ne font que le pied, des chirurgiens qui ne font que des hanches ou que des épaules, etc. Nous, nous faisons tout ce qui est en dessous de l'épaule.

Pouvez-vous nous parler un peu plus de l’organisation du Centre de la Main Sauvegarde ?

Dr RUYER. Le Centre de la Main est une association de quatre chirurgiens qui travaillent de la même façon, en partage d’honoraire. L'interchangeabilité des chirurgiens fluidifie la prise en charge du patient, ce qui est une nécessité dans la continuité des soins.

Plus largement, le concept est de réunir sur un même site — celui de nos locaux de consultation — un centre de kinésithérapie de la main, des infirmiers pour les pansements et des orthésistes spécialisés avec qui on travaille en étroite collaboration, un indispensable dans le membre supérieur. Le but du Centre de la Main Sauvegarde est de prendre en charge tous les services pour la chirurgie non urgente mais aussi tout ce qui nécessite une intervention rapide : traumatismes, fractures, ainsi que toutes les plaies de la main.

Quel est l’intérêt de la téléexpertise dans votre pratique quotidienne ?

Dr RUYER. Les médecins généralistes avec qui nous collaborons sont ravis de ce nouveau mode d'organisation. Lorsqu'un médecin généraliste reçoit dans son cabinet un patient qui a une infection du doigt, comme un phlegmon par exemple, il sait qu'une intervention chirurgicale doit être faite rapidement. Mais il sait aussi qu'il est difficile pour le patient de trouver un chirurgien disponible : tout seul, il contacterait 6 cliniques qu’il n’aurait pas de rendez-vous avant 3 semaines. Face à une urgence de la main, le médecin généraliste a besoin de pouvoir orienter rapidement son patient vers un chirurgien spécialisé.

Auparavant, il envoyait le patient aux urgences, ce qui occasionnait une congestion supplémentaire et une complexification du parcours de soins. Avec Omnidoc, la démarche est simplifiée : le médecin généraliste peut nous adresser directement sa demande, nous permettant ainsi de prendre en charge le patient rapidement. Cela fluidifie le parcours de soins tout en soulageant les urgences et en permettant au médecin généraliste d'accompagner au mieux son patient

Si on en revient à la genèse : quand et pourquoi avez-vous décidé de mettre en place un réseau de téléexpertise sur Omnidoc avec le Centre de la Main Sauvegarde ?

Dr RUYER. A l’origine, c’était à la demande des médecins généralistes. Plus précisément, c'est le CMSI de Bourg-en-Bresse qui nous a parlé d’Omnidoc car cela leur permettait de faire des demandes d'avis tout en étant rémunérés sur le temps passé à le faire. Avant, c’était pour eux du travail extra-professionnel effectué une fois les consultations terminées.

Cela répondait aussi au besoin de nombreux médecins de pouvoir contacter directement et facilement des chirurgiens, même sans les connaître. Il y a pas mal de remplaçants ou d'internes en médecine générale qui n'ont pas encore un réseau suffisant pour pouvoir appeler un chirurgien et avoir une réponse rapide. Sur Omnidoc, ils y ont accès en quelques clics.On peut ainsi traiter par téléexpertise de nombreuses demandes urgentes car parfois, le médecin généraliste a juste un doute sur une radio ou besoin de s'assurer qu'une opération n’est pas nécessaire. En passant par Omnidoc, cela évite une consultation inutile pour le patient.

Quels sont les principaux types de demandes d’avis que vous recevez ?

Dr RUYER. À 90%, c’est de la médecine générale pour toute la traumatologie du membre supérieur, avec deux grandes catégories.

Un premier cas où le médecin généraliste écrit au chirurgien pour savoir si une intervention chirurgicale est nécessaire. On va alors rendre un avis qui peut aboutir à deux cas de figure.
Soit l’opération est nécessaire et l’on va convoquer le patient pour une prise en charge.
Soit ce n’est pas nécessaire - une fracture ne nécessitant qu’un plâtre par exemple - et on va pouvoir conseiller le médecin sur la conduite à tenir. Dans ce cas-là, le patient aura tout de même été traité selon les consignes d’un spécialiste sans avoir eu besoin d’en voir un.

La deuxième catégorie inclut tout ce qui est de l’ordre du doute diagnostique. Je pense par exemple à un médecin qui suspecte une fracture mais souhaite s’en assurer. On pourra alors confirmer ou redresser le diagnostic. Répondre simplement à cette question, c’est déjà une étape de consultation en moins.

La plupart de vos demandes vous sont donc adressées par des médecins généralistes. Quels sont les autres professionnels de santé qui peuvent être amenés à vous solliciter via Omnidoc ?

Dr RUYER. Nous sommes beaucoup sollicités par des kinés qui réorientent un patient relevant en fait d'un avis orthopédique. Comme le réseau de kinés de la main dans la région lyonnaise est petit, ils nous contactent généralement directement mais tout pourrait passer par Omnidoc.

On est aussi sollicités pour avis par des orthésistes qui reçoivent un patient dont l’ordonnance est peu claire ou incohérente, auquel cas je peux confirmer ou infirmer le diagnostic et recevoir le patient en consultation.

Enfin il y a une dernière catégorie, ce sont les urgentistes. Aujourd’hui, après consultation, les urgentistes de nuit à la clinique impriment le dossier patient et le mettent dans une boîte aux lettres pour qu’on le récupère le matin, une méthode qui a pas mal de failles. Nous avons donc discuté de mettre en place Omnidoc au sein de la Clinique de la Sauvegarde pour remplacer ce système.

Quels sont, selon vous, les avantages d’avoir lancé un réseau de téléexpertise sur Omnidoc ?

Dr RUYER. Cela nous apporte de la visibilité et nous permet d’être beaucoup plus réactifs, car toutes les demandes d’avis sont vues par nous quatre, ce qui veut dire quatre fois plus de réactivité. S'il y en a un qui est absent, ce sont les autres qui s'en chargent.
De la même manière, si l'on demande à nos secrétaires de convoquer un patient, elles feront au mieux pour répartir sur un des quatre chirurgiens et assurer une prise en charge rapide.

Par ailleurs, cela permet de centraliser en un endroit toutes nos demandes d'avis pour les gérer à quatre de manière mutualisée. Par exemple, récemment, deux d’entre nous étaient en congé. J'ai opéré huit patients au bloc et j'ai eu trois urgences. En sortant, j'ai constaté que j’avais à la fois des demandes d'avis sur Omnidoc, à la fois des demandes sur WhatsApp et à la fois des SMS. À la fin de la journée, difficile de se rappeler ce qu’on a répondu et à qui. C'est là qu’on peut commencer à oublier de prendre en charge des patients.

Vous parliez de vos secrétaires, ce sont donc elles qui dispatchent les demandes sur les chirurgiens ?

Dr RUYER. Tout à fait. Vu que nous faisons tous la même chose et que nous sommes en partage d'honoraires, peu importe celui qui opère. C'est notre volonté d’offrir un service le plus réactif et le plus continu possible : on est interchangeables. Sur de la traumatologie, les patients ne vont généralement pas chercher à se faire opérer par un chirurgien en particulier. Ils se font opérer par ceux qui le peuvent et qui le font bien.

Avez-vous constaté une hausse du nombre de patients que vous traitez depuis la mise en place de votre réseau de téléexpertise ?

Dr RUYER. Très probablement, même si ce n'est pas du tout dans ce sens là qu’on l’a mis en place.

Mais il est certain que cela nous a apporté de nouveaux médecins requérants car on est fréquemment sollicités par des médecins généralistes parfois très éloignés qui ne nous connaissaient pas avant de nous trouver sur Omnidoc. Je constate souvent qu’il y a des noms qu'on ne reconnaît pas ou des remplaçants de certains médecins généralistes qui nous contactent par ce biais-là.
Si ça augmente notre annuaire de contacts, on peut logiquement se dire que ça augmente le nombre de patients qu'on prend en charge.

Qu’auriez-vous envie de dire à des chirurgiens orthopédistes qui exercent dans un centre comme le vôtre ?

Dr RUYER. Que pour nous, la téléexpertise apporte de la réactivité et est une vraie aide à la prise en charge par la mutualisation et la centralisation de tous les avis. Selon moi, c'est une très bonne évolution de la médecine.
La téléexpertise fluidifie, rend plus simple le parcours patient en évitant des consultations inutiles. C’est parfait pour nous qui mettons un point d’honneur à être hyper disponibles pour les médecins généralistes et à prendre en charge la traumatologie, qui représente au moins 50% de notre activité. On aime bien ça et on est bons là-dedans.

S’il fallait s’adresser à des confrères dans ce même état d’esprit, quel conseil leur donneriez-vous pour profiter au mieux de la téléexpertise ?

Dr RUYER. Quand on est plusieurs et qu’on est interchangeable, je ne peux que les encourager à monter un réseau de téléexpertise. C’est tellement simple et facile à mettre en place que le conseil, c’est juste de le faire !


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